Doit-on réellement apprendre à apprendre ? La réponse n'est pas simple et dépend de nombreux facteurs.
Métacognition : Apprendre à apprendre
Avant d'aller plus loin, définissons deux processus totalement différents :
Apprendre et Apprendre à apprendre
Apprendre : Acquérir un ensemble de connaissances soit par l'expérience soit par un travail intellectuel.
La métacognition consiste à mener une activité mentale sur ses processus mentaux. Apprendre à apprendre fait partie de la métacognition.
Apprendre à apprendre : Améliorer ses capacités d'apprentissage, apprendre plus et mieux, en réfléchissant à ses processus mentaux, à sa façon d'apprendre.
Apprendre naturellement par nécessité et/ou pour évoluer
Dès la naissance, nous apprenons.
Le tout petit apprend à reconnaître la voix de ses parents. Il apprend à identifier sa fratrie et son environnement.
Il apprend à sourire, il apprend à communiquer ses besoins, il apprend à parler, il apprend à marcher.
On n'enseigne pas au tout petit comment il doit apprendre à sourire, parler, marcher, etc.
De la même façon, les humains ont appris à utiliser le feu, à utiliser des silex, des flèches, à pêcher, à cuisiner, etc.
Pour évoluer, pour survivre, les humains n'ont pas eu besoin qu'on leur explique comment apprendre, tout au plus ont-ils eu besoin qu'on leur montre et qu'on leur explique ce qui était réalisé et comment le faire.
Dans toutes ces situations, il ne s'avère pas utile d'analyser comment on apprend.
Apprendre par motivation personnelle et/ou par passion
Regardez le sourire sur le visage de l'enfant qui, caché sous un drap, lit un peu plus longtemps que prévu ou tout simplement parce qu'il a envie d'une expérience encore plus personnelle. Cet enfant là n'a aucun besoin qu'on lui dise comment apprendre ce qu'il découvre ou d'y réfléchir. Il est totalement immergé dans son univers !
De la même façon, le passionné de musique, le passionné de mécanique, le passionné de cuisine ou tout autre passionné n'a pas besoin de réfléchir à comment il apprend. Il vit tout simplement sa passion et lorsqu'il se trompe, il recommence et/ou il change tout simplement de point de vue et il finit par réussir.
Si vous ne connaissez pas, je vous encourage vivement à découvrir un ouvrage de John Holt, en particulier "Comment l'enfant échoue, l'école ou la fabrique de l'échec". Dans cet ouvrage, on découvre ses expériences en tant qu'enseignant, les expérimentations qu'il fit pour améliorer le niveau des enfants accompagnés et petit à petit, deux constats :
un enfant en grande difficulté scolaire peut en fait réussir brillamment y compris par exemple lors de calculs complexes hors école tandis qu'à l'école, il échoue sans cesse en mathématiques y compris pour des calculs simples.
le système scolaire saborde trop souvent la confiance interne de l'enfant, sa motivation et sa capacité à réussir.
De fil en aiguille, il en est venu à s'intéresser à l'instruction en famille, à l'étudier et plus particulièrement il s'intéressa au unschooling qui n'est pas un "refus d'instruction" mais un "centrage sur l'enfant, acteur et moteur de ses apprentissages", on va alors tout mettre en oeuvre afin que l'enfant poursuive sur le chemin de sa motivation personnelle et que sa confiance en ses capacités d'apprentissage soit préservée.
Apprendre à apprendre : une question scolaire avant tout
Apprendre à apprendre est en fait une question généralement posée dans un contexte unique : un contexte scolaire.
Est-ce nécessaire ?
Pour l'enfant sans difficulté, apprendre à apprendre n'est visiblement pas une nécessité.
Lorsqu'avec mes filles, nous avons préparé le bac à la maison après des années d'une approche alternative et sans cours par correspondance, il fallut découvrir des codes uniques : les codes scolaires. En effet, pour les examens scolaires, on attend le suivi de certaines règles purement scolaires : une présentation, une façon de raisonner, une façon de démontrer, une façon de présenter son travail. Dans leur quasi totalité, elles ne sont pas utilisées dans la vie de "tous les jours", puis dans la vie professionnelle, elles sont cependant indispensables pour réussir scolairement. C'est d'ailleurs pourquoi certains réussissent brillamment leur vie active alors qu'ils échouaient dans la vie scolaire quand d'autres sont en difficulté dans leur vie active alors qu'ils étaient de brillants élèves.
Pour réussir au bac, comme bien d'autres enfants, mes enfants n'ont pas dû apprendre à apprendre, elles ont dû apprendre les règles scolaires. Pour cela, il fallut décrypter les règles attendues (ce fut mon travail), puis les leur expliquer. L'une a beaucoup freiné "des orteils", elle n'y voyait aucun intérêt, elle obtint le bac cependant. L'autre avait une solide motivation : elle voulait sa mention et elle l'a obtenue malgré sa dyspraxie.
Au contraire j’ai souvenir d’un jeune homme brillant en sciences avec des connaissances impressionnantes et qui échangeait fréquemment avec des experts. Or au bac de biologie, il a eu 4/20 ! Etait-ce parce qu’il n’avait pas « appris à apprendre » ? Non, il avait peut-être même des connaissances supérieures aux personnes qui l’ont corrigé pour certains thèmes, mais il n’avait aucune idée des formulations attendues et ça a tout changé. Le problème n'était pas qu'il n'avait pas appris à apprendre, mais qu'il n'avait pas appris la façon de répondre attendue.
Plus l'enfant est confronté tôt à l'école et son modèle imposé, plus il doit apprendre tôt ces règles et comme celles-ci ne sont pas naturelles, il peut donc avoir besoin qu'on lui explique (d'autres les intègreront naturellement seuls).
Il ne s'agit alors pas d'apprendre à apprendre, mais d'assimiler un modèle particulier.
Apprendre à utiliser ses forces et à compenser ses faiblesses
Cependant, différents exercices ciblés scolaires peuvent aussi poser problème, comme c'est le cas par exemple des poèmes, tables de multiplication, et de l'orthographe. C'est d'autant plus vrai que la motivation manque régulièrement.
Le premier point à prendre en compte est la motivation : comment apprendre si on n'a aucune motivation pour l'apprentissage en question ? Il s'agit alors de réfléchir à comment créer la motivation.
D'autres difficultés peuvent être liées à un mode de fonctionnement cérébral particulier, il peut ainsi être difficile de saisir l'information pertinente ou bien de mémoriser durablement une connaissance ou une compétence. Pour aider les personnes concernées, Isa LISE a notamment rédigé Mémoire d'éléphant- Mémoriser avec un trouble dys ou pas.
Apprendre à apprendre peut paraître particulièrement important dans ces circonstances, cependant c'est couteux en énergie et concentration car cela suppose une analyse. Or cette analyse risque d'être faussée pour deux raisons :
un outil qui fonctionne dans une circonstance ne fonctionnera pas dans une autre circonstance,
on a tout à gagner à utiliser plusieurs outils et chercher à analyser le plus performant fait en réalité perdre en efficacité et risque de nous pousser à délaisser une approche utile. (en particulier si difficulté d'apprentissage)
Il est utile de savoir comment notre cerveau fonctionne (ce qui me semble une autre question), en particulier en cas de profil particulier et trouble des fonctions exécutives ou sous-utilisation de nos forces.
Sans se limiter à une approche unique, il est alors utile d'observer ce qui nous réussit.
Cependant, il me semble particulièrement nécessaire de ne pas s'arrêter à un moyen d'apprendre car en réalité, surtout si on cumule les difficultés d'apprentissage, on gagnera à nourrir sa motivation, disposer d'une boite à outils complète et varier les façons d'apprendre.
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